Nagai Park (1) : Soccer, Sun and Stockings



Le 11/03/11, une série de calamités s'abattit sur la région du Tohoku, au Japon : il y eut un tremblement de terre, suivi d'un tsunami qui rasa plusieurs villes et entraîna des mal-fonctionnements dans la centrale nucléaire voisine.

C'est incroyable comme tout devient moins sentimental ou dramatique sans le lot habituel d'adjectifs épithètes — terrible, grand, énorme, puissant, dévastateur, au choix et non-exclusivement, pour la phrase précédente.

Par voie de conséquence, tout le pays fut parcouru d'un mouvement de solidarité et d'entr'aide qui prit la forme de volontariat physique sur le terrain, de collectes ailleurs et de dons d'argent et de produits de première nécessité.

Le point culminant de cette solidarité nationale fut très certainement le très-attendu match caritatif qui fut organisé entre l'équipe nationale de football, les célèbres Samurai Blue, et une équipe de représentants de la J-League (ligue japonaise de football), Team As One, qui eut lieu le mardi 29 mars 2011 au stade de Nagai à Osaka.

Les billets en pré-vente disparurent en quelques minutes. La queue pour les billets à acheter sur place commença 24 heures plus tôt. Il faut préciser le récent engouement du peuple japonais, en particulier les jeunes filles et les femmes au foyer, non pour le ballon rond, mais pour les belles fesses fermes de Honda Keisuke, devenu une idole interplanétaire après sa prestation durant la coupe du monde de football en 2010.

Nous fûmes dans l'incapacité de nous procurer un billet en pré-vente pour le-dit match — même nos contacts personnels avec des joueurs des Gamba Osaka ne furent d'aucune utilité — et, ayant d'autre chose à faire que de poireauter toute la nuit, froide, à fin d'obtenir une place, nous apprîmes qu'une séance d'entraînement devait avoir lieu la veille, et allâmes gaiement voir de quoi il en retournait, par une belle fin d'après-midi, et assister à l'échauffement et au court match qui précéda celui, déjà légendaire, de l'en-demain.

Non, en fait, je ne pense rien du football japonais, n'ayant de préférence nationale mais aimant simplement le bon sport, que les équipes nippones échouèrent plus souvent que pas à délivrer : je me fis traîner là par compagne, qui est bon public et aime bien (regarder) le sport en général, par fois et ailleurs en stade, ce qui est déjà mieux qu'à la télé. Quiconque lit ces pages sait à quel point j'aime la télévision. Je me dis simplement que ça ferait une petite promenade.

Voici le récit de cette fin d'après-midi.


En fait ça tombait bien : on n'avait jamais mis les pieds au Osaka Nagai Stadium, qui n'est pas petit mais se situe au sud d'Osaka, station éponyme (Nagai) de la ligne Midosuji. Je viens de voir sur Google Map (cf. lien) qu'il y a aussi un étang : ce sera pour la prochaine fois. Ce coup-ci, on fit ligne droite, ou presque, direction le stade.


L'abord me fit penser au parc de Tennoji : les papys à casquette qui papotent et boivent. En attendant, on s'approche, et s'inquiète à la vue d'un rassemblement, assez loin de l'entrée du stade.


C'était déjà la file d'attente.
Mais plus important que cela, c'est là que débute le fil conducteur de cette première partie : une paire de jambes en collants, dont les reflets au soleil couchant nous fascinèrent jusqu'à l'entrée.


Ah, c'est un parc, donc forcément il y a aussi des gens qui n'en ont rien à faire du foot ou de la file d'attente. Des gens avec des chiens, par exemple.



On commence à se rendre compte de l'étendue des dégâts.


C'est long.




Des gens qui passent, en sens inverse, qu'on croise en un sens, l'autre, des gens inconcernés, et d'autres qui, s'étant présentés directement à l'entrée du stade, se firent bien avoir, et durent remonter la queue à contre-courant, tout le long.


Un stade de baseball, déserté, à côté.



Regardez-moi cette belle ligne nette, bien proprette : une merveille. Ce n'est pas l'œuvre d'un génie national souvent attribué hâtivement, mais celle des membres du personnel du stade (en vert, si vous avez de bons yeux), placés à des points stratégiques. Là où, en revanche, le génie national joue, c'est la résistance mentale à l'action, devant public (souvenez-vous de l'anneau de Gygès)(si vous ne savez pas ce que c'est, relisez vos classiques), qui placera l'acteur dans une position qui le démarquera des autres : personne ne coupe la file, donc personne ne coupe la file — j'espère que cela fait sens.

Ah, cette théorie ne s'applique pas aux mamies, qui se croient à présent vénérables et donc tout-permis, et qui par conséquent s'amusent entre elles comme des folles et vivent centenaires, au contraire de leurs maris désœuvrés qui sombrent souvent dans l'alcoolisme (et louent des DVDs porno chez Tsutaya en masse — découverte récente).

Au tour et dans la file, beaucoup de jeunes filles, et de jeunes mères au foyer accompagnés d'enfants, très peu d'hommes ou maris (il est 16 heures, ça bosse encore), quelques grands-parents qui accompagnent le petit-fils. Ambiance légère de printemps. La tête est loin du désastre territorial, humain, nucléaire.


Les skateurs ont-ils profité du vide laissé par la file, ou les membres du personnels ont-ils dirigé la file dans le but d'éviter d'empiéter sur le territoire des skateurs ? Mmmh.






On approche enfin.
L'architecture extérieure se tient, c'est imposant, équilibré, pas encore trop vieilli,
et occasion de beaux clairs-obscurs.




Il est temps de voir où ces jambes mènent,
et de les laisser là,
jusqu'à la prochaine fois.


La suite !

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