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Chronique d'un suicide annoncé


   C***, 23 ans

C***, 23 ans, travaillait pour une grosse entreprise japonaise de transport qui, après le choc Lehman, vit sa clientèle fondre et dû prendre des mesures radicales pour assurer sa survie : C*** fut victime, comme tant d'autres Japonais, du licenciement économique.

C*** n'avait pas grande économie, préférant dépenser en amusements qui équilibraient le stress causé par un travail difficile aux horaires peu familiaux. Ses parents étant morts dans un accident de la route deux ans plus tôt, lui laissant par ailleurs de petites dettes pour lesquelles il dut vendre la maison familiale, il ne put "revenir au pays", comme il est de coutume chez les Japonais en transition d'emploi.

Après cinq mois de recherches infructueuses, il commença de désespérer, se mit à boire, ne put payer son loyer, fut mis à la porte par un propriétaire peu enclin à la charité — concept occidental s'il en est — et perdit avec son adresse postale, son adresse bancaire et autres maigres prestations sociales.


   C*** : misère, solitude, dénuement.

On le voyait errer dans la galerie marchande ou dans les lotissements autour de la gare d'I***, dans la proche banlieue d'Osaka, à chercher dans les poubelles le moyen de sa subsistance, ou dormir sur le banc d'un parc, sous l'œil désapprobateur et craintif des mères au foyer.

Chaque jour il semblait prendre une année, il maigrissait et les traces de la misère et de l'usure se faisaient de plus en plus nettes sur son visage, ses vêtements.

C*** eut le destin qui menace plusieurs milliers d'hommes et femmes au Japon et dans le monde, placés peu ou prou dans la même et désespérante situation que lui : il se jeta du haut du pont piéton qui enjambe la galerie marchande d'I***, alors même que les hauts-parleurs passaient en boucle des chansons de noël, que les couples joyeux faisaient leurs courses, que les enfants, chaudement emmitouflés, passaient bruyamment en courant à deux pas de lui.

Alors, les gens lui donnèrent, pendant une demi-heure, ce qu'il avait cherché pendant des mois : un peu d'attention. Puis ils retournèrent bien vite à leurs vies plus ou moins confortables, et le souvenir de C*** s'éteignit pour eux après le dîner, durant lequel l'anecdote du suicide d'un clodo fut racontée à toute la famille, qui lui préféra la météo du lendemain.


C*** sur le point de faire le grand saut du désespoir.
Après avoir pris la photo, nous ne parvînmes pas à temps pour le secourir : il nous vit et se hâta, résolu.
Paix à son âme.


Car la viande noire fait la nique aux crocs, madame !

Chronique du Gambaru


Un têtard japonais gambarant mal barré.


頑張る — がんばる

Le Gambaru, c'est la mythologie japonaise par excellence, et l'exact opposé de la culture du génie.

Gambaru, c'est en gros faire de son mieux en prenant sur soi, une sorte d'abnégation forcenée, qui s'applique à tout et n'importe quoi (boulot, civilité, sport, &c.) du moment que ce quoi est déplaisant : on ne gambare pas par plaisir, c'est mal vu.

Le gambaru est par ailleurs entré dans l'esthétique nippone, et si d'aventure apparaissait à la télé quelqu'un qui se démenât, il serait fort probablement gratifié d'un Kakkoiii ! sauf si d'autres facteurs intervenaient, comme la calvitie ou l'obésité ; mais c'est une autre histoire.


Au Japon, gambarer c'est une chose, gagner c'en est une autre.
Qui nécessite l'aide des dieux, semble-t-il.

Notez toutefois que l'important, c'est moins le gambaru que l'apparence du gambaru — d'où ces grimaces et courses inutiles en terrain de foot, et ces longues heures de (présence au) boulot, voire ces heures de maquillage, et aussi ces roupillons qu'on pousse sans gêne dès que tout le monde a le dos tourné, ou fait semblant de ne regarder pas. Il faut donner l'impresssion de faire de son mieux, de s'agiter, d'en chier correctement.

En un sens un peu moins prolo, le gambaru, c'est aussi ne pas savoir sa place, c'est persévérer en dépit du bon sens, malgré tout, car il est censé incarner l'âme nipponne, qui vainc et surmonte tous obstacles (surtout quand ils sont étrangers, y compris soi-même : Quand bien même vous n'auriez aucun talent pour servir l'Empire, vous reste le talent du gambaru) par la persévérance, l'effort continu et répété — et l'important, une fois encore, c'est la visibilité de l'effort fourni, pas le résultat.

Enfin bon, le résultat compte tout de même, car le gambaru n'existe que s'il y a public, que s'il y a encouragement (応援 おうえん) à persévérer. C'est l'invective, l'ordre du Gambare ! (Allez, donne-toi à fond, vas-y, tiens bon ! et autres bêtises), ce cri de soutien du spectateur au sportif, de la femme au foyer au mari — bref, de celui qui ne fout rien, à celui qui trinque, trime et sue. Et même si en cours d'(apparence d')effort le persévérant est l'objet de tous éloges, attendez de voir le changement d'attitude si jamais le match est perdu, si jamais la paie ne tombe pas dans le compte en banque de l'épouse en fin de mois...


Des gambarants en jour de chôme.

Du coup, on montre bien plus souvent un persévérant nippon qui gagne, si possible : voyez par exemple la tripotée de manga sur le sujet, depuis Salaryman Kintaro à Hajime no Ippo. Ou de dorama / drama, d'ailleurs.

Le Gambaru n'est toutefois pas loin de l'American Dream et du mythe du SMM (Self-Made Man) — manquent juste quelques facteurs décisifs : l'ambition, l'initiative, la prise de risque, n'est-ce pas. C'est que le gambaru préfère se la jouer safe, et l'on ne va jamais que dans le sens entendu / attendu des encourageants et supporters. On risquerait d'être traité de génie, et c'est mal vu, ça aussi — sauf si le-dit génie est reconnu comme tel à l'Ouest ; mais c'est une autre histoire. Et du reste, je n'en ai jamais rencontré.

On pourra mettre le gambaru sur le dos d'une tradition ou "disposition / nature" nationale à laquelle l'étranger ne pourra, parce qu'étranger, de toute façon rien comprendre, n'est-ce pas.


Après l'apparence d'effort, le semblant de réconfort.

Ce n'est pas le moindre paradoxe apparent du gambaru que d'être présent dans une société qui infantilise, dorlote et assiste à ce point ses membres — enfin, ceux qui ont les moyens de l'être, parce que les autres, ils peuvent crever. Du "service à la japonaise" aux distributeurs automatiques.

Enfin bref, c'est une fois encore de la tartine-généralité tout ça, qu'il serait intéressant de creuser mais pas le temps, et le Japon ne manque par ailleurs pas de jeunes entrepreneurs, de professés-libéraux et d'aspirants peintres malgré les parents. Amusant de constater que les noms qui surnagent, sont rarement ceux des gambarants-modèles, parce que bon, un persévérant sans talent, ça n'a jamais donné grand-chose, n'est-ce pas : c'est comme partout.

J'dis ça j'dis rien.


Brûlez un cierge pour les Japonais morts au gambaru.


Car la viande noire fait la nique aux crocs, madame

Feuilles d'automne au Japon


Le tourbillon sacré des couleurs en automne.


C'est le long de ces froides et dures soirées d'hiver qu'il est bon de se souvenir des choses qui font chaud au cœur. Pratiquons par conséquent un peu le hors-saison.

Le Japon est justement renommé pour ses merveilleuses, fantastiques, splendides et ineffables feuilles d'automne — 紅葉 こうよう / もみじ kôyô / momiji— dont les langues occidentales peinent à retranscrire le mot, sa richesse, et la foison de sentiments contradictoires et poétiques qui affluent dans l'âme japonaise à son évocation, ou en pleine contemplation zen (紅葉狩 もみじがり momijigari) du phénomène sans semblable aucun, mis à part en pâle imitation dans quelques pays barbares et insignifiants, comme la Corée, la Chine, le Canada, quelques états des USA (rebaptisés Universal Studio America par le gouvernement japonais, par référence au célèbre USJapan d'Osaka) comme la Nouvelle-Angleterre, le Massachusetts, dans le Nord-Ouest pacifique et j'en passe, car ce n'est vraiment pas important.


L'art subtil et naturel du kouyou,
ici dans un parc couru et renommé de Sakai (Osaka, Japon)


Cette année fut particulièrement bonne pour les adeptes des feuilles d'érable jaunissant, rougissant, orangissant, et de celles qui restent vertes. Le comité pour la sécurité routière japonaise a par ailleurs lancé un avis aux automobilistes, à fin de les mettre en garde contre les érables pouvant être pris pour des feux tricolores. Faites attention vous aussi.

La pratique de la contemplation du changement de couleurs des feuilles en automne est, bien entendu, une pratique pluri-millénaire, de même que celle, également fort prisée, de la contemplation des sakura /  fleurs de cerisiers (japonais). C'est ainsi une tradition ultra-ancestrale qui perdure et se reproduit chaque année, sans faire de petits, au grand dam du gouvernement japonais.

Le premier sentiment qui surgit dans le cœur des Japonais alors est un sentiment de paix intérieure : la chaleur étouffante de l'été a passé, la froide rudesse de l'hiver n'est pas encore là, la beauté de l'automne et ses couleurs sont un confort et réconfort sans nom pour les souffrants et mécontents permanents.


La beauté de la nature japonaise


Le sentiment qui suit derechef le premier, c'est bien évidemment la nostalgie, sentiment japonais s'il en est, car au moment même où le Japonais se rend compte de la merveille du phénomène automnal, il réalise que ce temps sera bref, et que bien tôt tout se flétrira, tout sera froid, noir et dur.

C'est alors des millions de communiants en émerveillement nostalgique, réminiscent et anticipant, devant la beauté de la nature et le changement des saisons, unis par le chœur de leurs pensées, de leurs corps émus, et par la pression urgente de l'index sur le déclencheur de l'appareil-photo numérique au télé-objectif surpuissant, à fin de saisir et conserver cet instant éphémère et précieux.


L'Akizaké ou Koyozaké implique un véritable dialogue entre l'homme, la nature et les dieux,
recherché des connaisseurs.


La communion des âmes et corps se poursuit par ailleurs dans le rituel ancestral du partage du liquide sacré, qui a pour conséquence la plus fréquente la possession du saint-buveur par l'un des milliers de dieux japonais. La dite possession fait l'objet de nombre études, et nous rappellerons simplement ses traits caractéristiques : l'émission de cris rauques, de chants tonitruants, le débridement de la personnalité, la convulsion frénétique, qui se termine le plus souvent par le relâchement du dieu dans un vomi, et l'assoupissement du possédé dans un lieu aléatoire : banquette de train, poubelle, caniveau.

Il s'agit également par-là, bien sûr, d'oublier la brièveté de ce magnifique moment et le visage du chef de service qu'on retrouvera l'en-demain s'il n'est déjà de la partie, dans un tourbillon de chatoiements alcooliques.



La variante koyomi dite "bonsaï" :
chercher le koyo dans le microcosme végétal.


À juste fin de varier le plaisir pour ne le tuer pas, a été développé ou repris une large sélection de variantes de cette pratique nippone, qui ont toutes leurs spécificités, curiosités et intérêt certain. Mentionnons à titre d'exemple l'Observation du Petit Monde — 小世見 こよみ koyomi — qui cherche l'automne et ses feuilles chatoyantes dans le monde minuscule des feuilles du raz-de-terre, à fin de réaliser combien l'on est grand face à l'herbe, et petit face au monde. Les adeptes de longue date du koyomi s'emploient également à appliquer cette philosophie au moyen de microscopes — 小ヶ世見 こごよみ kogoyomi : c'est l'Observation du Tout-Petit Monde.

Méritent également attention parmi la horde de pratiques anciennes, modernes et contemporaines dérivées du momijigari : la contemplation des feuilles d'automne dans les motifs des services de table traditionnels japonais, la chasse aux plus belles photos de kouyou sur le monde internet japonais (c'est à dire, yahoo.co.jp), le mimétisme costumier féminin (habits aux couleurs d'érables changeants, variante : petites culottes à motif saisonnier, fort appréciées des pratiquants de la précédente), la construction dans les écoles de pyramides humaines au moyen d'écoliers portant des t-shirts (variantes : chapeaux) rouges, oranges, jaunes et verts, la recherche des allusions chromatiques automnales dans Le Dit de Genji, l'art du choix de la plus belle feuille d'érable japonais à fin de naturisme sur le modèle adamique, &c.



Exemple de tentative manquée de saisie de petite culotte à motif automnal.


En guise de conclusion, nous vous invitons à découvrir de première main ce subtil art japonais l'an prochain, de préférence au Japon qui, à en croire les dires des autochtones, est le seul pays de la planète à avoir au moins quatre saisons marquées. D'ici là, puisque le Japon est la seule île au monde épargnées par les calamités mondiales comme le réchauffement global et la pauvreté, il y aura la Contemplation du Sakura au printemps, pratique profonde auquel nous consacrerons logiquement une chronique l'été prochain.

Rien ne vous empêche, entre temps, de vous entraîner au moyen des nombreux simulateurs de momijigari en ligne (maîtrise du japonais fortement recommandée).

Passez un bel hiver, automne et printemps en cœur !



Car la viande noire fait la nique aux crocs, madame

La Condition des Femmes au Japon



Manifeste
Pour la Libération des Femmes Japonaises

Declaration
For the Liberation of Japanese Women


Il est grand-temps de s'insurger contre la condition misérable des femmes au Japon, jouets de la société avant le mariage et esclaves de la famille ensuite.
Afin que le monde entier ne demeure dans l'ignorance de cet état des choses dramatique, nous avons tenté d'en dresser un tableau bref et objectif.

*

Avant mariage, la situation féminine au Japon est peu enviable.

Dénigrées dans un monde du travail machiste, gynéphobe et misogyne, reléguées à la photocopieuse, à la machine à café, ou préposée robotique à la réception de clients sur-gâtés, elles évoluent en état de fatigue et de stress permanent, auquel s'ajoute le stress causé par les méfaits du stress et de la fatigue sur leurs peaux délicates.

De fait, la femme japonaise vit dans un état de dépendance exacerbée : le problème de l'autonomie féminine est pressant. Elles sont obligées de rester chez leurs parents à fin de satisfaire leurs besoin essentiels en crème de nuit et jour, huiles et lotions pour le visage et le corps, tailleurs, robes jupes, pantalons, dessous, sacs, chaussures, bagues et colliers, &c. — car si d'aventure elles avaient de surcroît à payer un loyer, l'on compterait plusieurs millions de femmes vivant sous le seuil de pauvreté.

Non au stress du travail féminin
et au stress dû aux conséquences du stress !

Cette dépendance de la gente féminine envers leurs parents due aux coût des besoins personnels nécessaires, fait tomber — effet pervers s'il en est — une part de la population dans une prostitution plus ou moins avouée. Dans le but d'échapper à la misère financière, celles qui ont effectivement à subvenir à leur propre logement ou qui ont des besoins supérieurs à la moyenne, se retrouvent contraintes, par la force des chsoes, à coucher contre rémunération, en cadeaux ou argent comptant, pour joindre les deux bouts.

Notez que cette situation, toute scandaleuse qu'elle puisse paraître, est moins catastrophique que celles des lycéennes japonaises, de Tokyo en particulier, qui, pour leur part, ne peuvent légalement obtenir, en compensation de leurs prestations sexuelles, que des cadeaux qu'elles ne peuvent pas, le plus souvent, choisir elles-mêmes. Il est urgent de modifier la loi afin que les jeunes filles aussi, puissent librement disposer de leur corps pour répondre leurs besoins financiers nécessaires.

Non à la prostitution sans rémunération en argent comptant
des écolières et lycéennes japonaises !

Il convient de remarquer que cette situation est fortement liée à la difficulté de trouver le partenaire qui leur offrirait ce que ces inconnus porcins leur offrent à présent. C'est que la recherche d'un mari est un enfer pour nos jeunes nippones, du fait des exigences démesurées des hommes japonais, qui souhaitent à la fois mettre leurs sales pattes sur une femme plutôt jeune, plutôt jolie, plutôt fine, plutôt agréable en face comme en fond, et qui veuille bien faire l'amour de temps en temps. Ce délire de Yamato Nadeshiko moderne est la preuve, s'il en est besoin, de l'archaïsme masculin dans la société japonaise, qui a d'autres conséquences plus tragiques.

Car ces jeunes filles, révoltées qu'elles sont par ces demandes inhumaines, sont pourtant conscientes qu'elles s'y doivent plier, et sont de ce fait contraintes de se déguiser, grimer, maquiller, de changer leur corps et masquer leur âme, affligeant à celle-ci comme à celui-là des tortures sans nom, avec le coût exorbitant que cela représente, et pour l'égo et pour le portefeuille déjà si maigre. La spirale n'en finit pas.

*

Pour celles chanceuses qui parviennent à échapper à l'ostracisme et au suicide, et à trouver un compagnon de vie, le calvaire ne s'arrête pas là. Car la femme est en fait l'esclave à vie de la tyrannie du mari et de l'enfant.

Car les jeunes ou moins jeunes mariées japonaises sont pour une grande part confinées à la situation archaïque de femme au foyer, l'impératif sociétal d'une société profondément machiste, et soumises à l'ordre marital d'un époux dont la vie se résume à trois mots : travail, beuverie, irrespect.

Pire, leur sont déléguées toutes les tâches économiques, et la gestion du foyer. Ainsi, l'épouse est contrainte d'encaisser le salaire de son mari, avec lequel elle doit payer loyer, factures et achats personnels, de reverser environ 1% du restant, sous la forme d'argent de poche, à l'époux ou aux enfants, et de subtiliser le surplus dans l'angoisse d'être à la merci financière du "chef de famille".

Non à l'esclavage des femmes par la famille !

 De plus, quand un enfant vient à naître et survit aux retardements du système pédiatrique japonais, c'est l'épouse qui se doit de s'occuper du bambin : le mari, qui pourrait pourtant avoir part à l'éducation de l'enfant après ses quinze heures quotidiennes de travail, est grand absent.

Par conséquent, les jeunes et moins jeunes mères, déjà accablées par leur labeur de femme au foyer qui ne connaît pas de vacances et les soucis matériels incessants, arrêtent de travailler, si ce n'était déjà fait par injonction maritale, pour se consacrer au bambin, avec l'aide et le renfort permanent des grands-parents restants, qui sont mis sans cesse à juste contribution.

De surcroît, l'épouse et mère japonaise est condamnée à une vie sociale peu enviable.

Le seul moyen d'échapper à la pression psychologique de la charge de l'entière maisonnée et due à l'enfant confié à ses grands-parents, est en effet la sortie entre femmes dans la même déplorable situation, qui se résout souvent dans l'addiction au shopping d'objets de marque, aux pâtisseries de luxe surtaxées, voire, pour les cas les plus graves, à l'alcool, au pachinko, aux onsens et au sexe.

Non aux conséquences de l'asservissement féminin !

Car il n'est pas rare que les femmes au foyer, brisées dans leur rêve de riche industriel surchargé, fuient la dure réalité de leur condition dans le rêve de mousse d'un petit boulot (arubaito) sous-payé en soap-land (ou en tant que prostitutée privée), dans la dégradation de la chair et la fellation mouillée, dans l'espoir d'y trouver à la fois un irréel complément de revenu, l'oubli d'une famille ingrate et pourquoi pas le businessman rêvé, et dans la crainte d'y rencontrer leur mari.

D'autres, de même manière que ces pauvres travailleurs constamment à la recherche d'un emploi et situation plus enviable, fréquentent assidûment les cercles de rencontre. C'est en effet l'une des plus grandes injustices du monde envers la femme japonaise, que de ne pouvoir lui offrir du premier coup l'homme riche, beau, surchargé de travail, attentionné et prévenant à la maison, bon cuisiner, à la conversation brillante, drôle et cultivée, centre d'attention des amis, objet d'envie et occasion de jalousie des autres femmes.

*

En guise de conclusion, nous ne saurions trop souligner l'incomplétude et le caractère fragmentaire de ce sombre tableau, véritable ignominie et somme de traitements inhumains dont est l'objet la femme, épouse et mère japonaise, esclave méprisée de la société et du cercle familial.

Si vous souhaitez contribuer à l'amélioration de la condition féminine au Japon, et lutter contre l'oppression des femmes japonaises, partagez toute information pertinente dont vous pourriez disposer, et prenez le temps de parapher cet article en utilisant le formulaire de commentaire. Le nombre des faibles fait leur force : faites passer le mot ! Merci pour elles !

Par le partage de vos informations et vos signatures,
faites que la vie des femmes au Japon ne soit plus une descente aux enfers !

Gaga du Gachis : L'Air Conditionné au Japon

Dans une station ouverte, une belle machine à air conditionné, devant laquelle viennent récupérer de pauvres japonaises en syncope. Il est de coutume au Japon de foutre chauffage ou air-conditionné — c'est la même machine, dont l'emploi varie selon la saison — partout et de tout temps. Quand bien même personne ne mourrait de leur absence. Mis à part, peut-être, une mamie ou deux — et encore : elles sont tenaces. Bon, admettons : c'est censé faire partie du service, ça fait riche, etc. Admettons qu'un Japonais ne puisse survivre à plus de vingt degrés l'été, à moins de vingt-cinq degrés l'hiver. Allez savoir pourquoi. Mais admettons. Que de ce fait il faille mettre ces machines du diable consumériste dans tous les trains, tous les magasins, toutes les maisons... admettons. Mais bon, que même les stations ferroviaires OUVERTES — ouverte, comme dans : c'est à plein air, à ciel ouvert, ou y pas de porte, &c — en soient dotés, et que ça fonctionne — forcément — à fond les manivelles, là, ça me dépasse. Après, d'aucuns s'étonnent du prix du billet de train. Et des trous dans la couche d'ozone. Et du réchauffement de la planète, de la fonte des glaces, de l'élection d'Aso, de mon mal de crâne. J'en passe. Quel gâchis monumental. Le Japon fait la course aux médailles et aux positions symboliques. Vu que l'économie se casse la figure, que la Chine ne saurait tarder à écraser son nain voisin s'il peste un peu trop, les gouvernements et affiliés tentent de récupérer des distinctions du côté du sport (J.O.) et de la politique (Je me suis endetté à mort pour vous filer du fric, hein ? alors donnez-moi un siège permanent dans toutes les organisations mondiales que vous trouverez). Qu'ils ne s'inquiètent pas trop : le Japon et les Japonais ont au moins mérité le titre de champions du monde de gaspillage. C'est déjà ça. Appendice Il se trouve que le Japon fait aussi la chasse aux "personnes fortes" — aux GROS, quoi : depuis quand le fait d'avoir plein de GRAS est un signe de FORCE ? c'est quoi ce PC à la noix ? diable — les sumotori c'est une autre histoire : en plus d'être gros ils sont forts : rappelez-vous Honda dans Street Fighter 2 — enfin bref : Le Japon fait la chasse aux vilains gros métabos. Nous proposons de bannir toutes les machines à AC de l'archipel : ça leur fera incidemment perdre de la masse et du poids : rien de tel qu'une petite suée, n'est-ce pas. Un gros japonais, après avoir banni l'air conditionné de sa vie, et avoir beaucoup sué. D'autres propositions ? Car la viande noire fait la nique aux crocs, madame

Dents, Mâche et Baguettes


Je remarquai, il y a quelque temps, que les muscles de ma mâchoire étaient devenus tout faiblards : c'est qu'au Japon la mastication est réduite à portion congrue.

Au Japon, on ne se sert pas ou peu de ses dents : on mâche vaguement un petit truc — la langue parfois suffit, ou d'engloutir le tout avec la bière. C'est sans surprise — les gènes ont probablement leur part au jeu — qu'elles sont mauvaises.

La cause à quoi ? Aux baguettes, monsieur — pas le pain : chopsticks, o-hashi お箸, quoi — peu adéquates à la coupe : d'où cette célèbre cuisine japonaise à bouchées (一口) et, en tirant quelque peu peut-être, la préférence au tendre et au gras.

An apple a day... n'a aucun sens ici. D'abord, on les pèle, les pommes, et les coupe en fines tranches (un quartier c'est un quart de quelque chose) où l'on taille de petits lapins pour amuser la galerie. Ou un octobus — vous savez, la version huit bras du nekobus de Totoro. Vous savez pas ? ce n'est pas très important.

En revanche, si l'usage des baguettes ne développe pas les muscles maxillaires, elles rendent précoce l'arthrose et les rhumatisme articulaires. C'est que leur maniement est un peu plus complexe que celui d'une fourchette et / ou un couteau. Chouette, non ?

Alors on me dira : ben pourquoi ils gardent encore ces trucs archaïques, s'il n'y a que des mauvais côtés ?

D'abord, il n'y a pas que des mauvais côté : on peut faire plein de trucs avec les baguettes, dont l'effet serait diablement réduit, avec couteau-fourchette. Par exemple ce maniement exceptionnel. Il y avait aussi une vidéo didactique d'un intérêt faramineux ; mais YouTube devient père-sévère.

Et puis... Et d'ailleurs il ne faut pas poser de question : c'est la tradition, et c'est très bien comme ça. Le propre de la tradition, c'est d'être à elle-même sa propre justification, comme ça tout le monde est content. Ou alors on met ça sur le dos des ancêtres : c'est la même chose. De toute façon c'est connu, en tout pays, d'ailleurs : Avant c'était mieux — n'est-ce pas.

Et puis, les baguettes sont, spirituellement, matériellement et esthétiquement, le prolongement des doigts.

Les Japonais pensaient que les os étaient faits de bois (on pensait bien qu'Adam était fait de terre glaise, alors pourquoi pas) : les ayant petits, ils ont donc naturellement cherché à les allonger — un peu comme une prothèse pelvienne, si l'image vous convient — à fin de ne se les brûler pas, et de pouvoir aller piquer dans l'assiette — pardon : le bol des voisins plus distants.

Du reste, tentez d'insérer les baguettes entre la peau et les ongles, et vous verrez qu'elles y sont très bien, c'est chic et élégant en plus d'être pratique. Il y a résurgence du côté d'Aoyama, me dit-on.

Non, en fait, ils les ont piquées aux Chinois, comme tout le reste. Mais ça il ne faut pas le dire.


Car la viande noire fait la nique aux crocs, madame.

Le Japon des Villes


Vendredi matin.

En presse constante, comme tous jours ces derniers temps ; mais perdons un peu de temps ici.

Correctement irrité et remonté en diable : après la télé, c'est la machine à air conditionné qui réussit à faire son chemin chez moi. Merci la belle-mère et la copine.

Allez, généralisation outrancière et chronique satirique ; mais je m'en tape : ça défoule. Outré ? pas content ? c'est le même prix :


Il faut croire que les Japonais des villes sont devenus une peuplade faible, une assistée permanente. Un peu comme un vieil asthmatique tabagiste qui ne pourrait plus se passer de sa bouteille d'oxygène. L'assistance comme une drogue. Éléments de caricatures ? incapables de se passer de coiffeur-esthéticien, et d'air conditionné. Merci les jeunes et moins jeunes ridicules aux tifs teints engommés, l'A-C à fond les ballons toutes portes ouvertes. Je demande aux plus ou moins vieux comment ils faisaient il y a vingt, trente ans, cinquante ans — Ah ben oui, mais maintenant tu vois. Ouais, ouais, je vois, je vois, et prend note.


Je veux bien concevoir que c'est un peu partout pareil — ce foutu modèle consommateur amerloquain — ; mais le Japonais moderne ne semble être obnubilé que par la course au confort et l'argent. Rien ne bouge : vivre dans une bulle, protégé de tout ce qui n'est pas soi, qu'on dorlote en pensant nostalgiquement au temps merveilleux de la petite enfance, ou d'il y a cinq minutes. Entuber le plus de monde possible, et se gargariser de s'être fait avoir, sans le savoir. Et ces jeunes femmes et mamies qui se goinfrent et dansent en couinant Oishii. Tsss.

La légende qui rapporte que chaque salaryman se prennent en secret pour Musashi me fait bien rire. Il est grand temps que je me mette à cette Chronique du Gambaru, qui me trotte en tête depuis quelque temps. Ajouter à ça qu'on ne croise que rebelles à la noix ou femmelettes aux sourcils rasés.


Une vraie épidémie ne ferait peut-être pas de mal. Un petit tri, comme dans ces placards où l'on entasse les choses. Ici tout ce qui a plus de deux ans — allez : six mois — finit à la poubelle : 'faudrait peut-être appliquer la formule à ceux qui l'appliquent. Un petit tri, je vous dis.

En attendant, le Japon des villes, c'est la Grande Comédie, l'Opéra-Bouffe, où tous les archétypes de Molière, de la Précieuse Ridicule à l'Harpagon, se sont donnés rendez-vous, pour ne se parler pas, ou parler trop fort — pour ne rien dire, n'est-ce pas.


Allez, versons dans le dualisme littératruc de rigueur — c'est tellement plus confortable de naviguer dans des eaux sûres, chemins rebattus, et petites platitudes irréflexives —, sauf que, mieux que le Japon des villes "entre tradition et modernité", j'y vois plus un mélange malsain d'archaïsmes et de superfluité.

Enfin bref, reste le Japon des campagnes — pardon : des montagnes —, où tout, peu à peu, sûrement, pourrit aussi, juste moins vite.

C'est grand dommage, tout cela. Du gaspi, de l'ordure, de la perte. Mais que voulez-vous qu'on y fasse, ma bonne dame, hein ?


J'espère sans conviction aucune qu'une paire de Japonais — ou, à défaut, de transis du Japon francophones — lisent ces pages, histoire d'avoir un échange de commentaires un peu animé. Mais vu le niveau de français des profs d'université — sur Osaka tout au moins —, je ne rêve pas quant au niveau des élèves. Et pour les autres, on verra.

Et puis non, puisque de toute façon parler ne sert à rien, et qu'on ne convainc jamais personne : on ne veut, pense et fait que ce qu'on peut. Ça vaut aussi pour votre serviteur, qui se glorifie toutefois de pouvoir tout comprendre. Comprendre n'est pas Approuver ; Approuver n'est pas Comprendre. Ayez quelques milliers de masques et de façon de penser en réserve : on en reparlera.

C'est brouillon et décousu, je vais passer pour un foutu teigneux égotique ; mais comme je disais tantôt, je m'en tape, et ça défoule. Remarquez que je ne cite personne.

Tiens, parodions Viallatte, qui a, lui, toute ma sympathie. Et c'est ainsi qu'Haram est grand.


Car la viande noire fait la nique aux crocs, madame.

Le Qu'en dit-on et le Renom nippons.



と言われてる

est une expression qui fait loi au Japon, et que j'ai bien du mal à voir en peinture.
"Il est dit que..." — "... , en dit-on" — "... est réputé pour... " — "D'aucuns considèrent que..." : autant de manières, qui n'épuisent pas ces mots simples, de dire la même chose : l'absence de fondement de l'assertion.

Car qu'est-ce que cette voie passive ? qui est ce on ?
96% des consommateurs ? trois quarts de la population ? une part non négligeable des électeurs ? mon voisin ? ma cousine ? ta sœur ?
Eh bien, vous pouvez toujours chercher.

C'est le (faux) argument commercial par excellence, la meilleure manière de vanter (à tort), les mots qu'on n'emploierait pas si l'on avait des faits, des chiffres à présenter pour appuyer les dires.

C'est la renommée supposée, le renom facile, la rumeur dirigée, le papot de grand-mère, le ragot de femme au foyer — à l'échelle locale, nationale, mondiale.

...

Ça me fatigue d'avance de chercher de vrais exemple, ou même d'en inventer, tellement les media nous en gavent, alors voyez par vous-mêmes l'ampleur de la catastrophe.

On sait déjà qu'au Japon, la réputation fait tout. C'est à cause d'elle, ou grâce à elle, que les commerces fleurissent ou périclitent, que les athlètes sont encensés ou dénigrés, que le salaryman monte l'échelle ou se suicide, sans rapport aucun avec leur réelle valeur (si tant est que cela veuille bien dire quelque chose).

Eh bien ajoutez à cela que d'aucuns peuvent impunément la créer de toute pièce — seule restriction légale : l'insulte est bannie. Il suffit de prétendre l'avoir déjà entendue.

Et comme il est très important ici, de faire ce que tout le monde fait, ou est censé faire — car qu'en dira-t-on si l'on ne suit le qu'en dit-on ? — , ça fonctionne des feux de dieu.

En prenant le contre-pied, on pourrait encenser le procédé, qui ferait, suivant l'argument qui consiste à souligner qu'on précise bien que ce ne sont que dires rapportés, figure d'honnêteté exemplaire... I don't buy this.

Ne baissons pas la garde !
Grrr !



Car la viande noire fait la nique aux crocs, madame.

黒肉 (1) : Grévistes, encore un effort...


La Longue Marche mène au Ciel.

*

En vérité, la France vit, ces derniers mois, ces dernières semaines, ces derniers jours, vivra demain, des temps glorieux — des temps de grève.

Comme l'éthylomogie japonaise le confirme (ストラ•行き, sutora-iki : la marche du sutra), la grève est une prière en marche. Elle est un acte saint et superbe, une terrible croisade, qui croît de trève en trève, affermit les convictions des communiants, et aux ennemis de laquelle ne laisse que jurons de dépit et d'impuissance. En bouche.

Une grève est un acte pan-religieux. De fait, on rencontre parmi les croisés nombre différents croyants : c'est le propre de la grève de fédérer les opposés dans un même élan mystique.

Tous sont mûs par un credo unique : la foi en SOI.
Une part non-négligeable est animée d'une foi inébranlable en DIEU, quel qu'il soit. A titre d'exemple, voyez la dernière manifestation céleste sur terre : les croisés luttent obtenir tout (argent, temps, sécurité, services, assistance, &c.), en échange de rien (gratuité de tout ce qui précède, et plus) : cela pourrait relever de l'intervention d'un dieu sur terre.
C'est pourquoi le cortège des revendications est proprement liturgique : un service pour le peuple.
La liturgie gréviste est orchestrée par les ministres de la foi, nommés syndicats (originairement ordre missionnaire millénaire et péruvien, les Saints d'Ica), qui ne craignent pas, dans leur miséricorde, de prendre siège à la même table que ceux qu'ils combattent, et de raisonner, pour le bien de tous et, modestement, le leur (ils ne remplissent que leur office, et ce n'est que justice).
Les autres Grévistes ont des envies Diverses.

Les moyens sont toujours radicaux et pacifiques : on cesse tout travail, emploi, service, et marche longuement en rue (les transports en commun étant paralysés, ne restent que les pieds). C'est dire le vœu de non-violence, et l'esprit de sacrifice sans pénitence, de cette active communauté. Les enfants même cesse d'aller à l'école : il faut les écouter ; car on sait ce qu'on dit de leur bouche, et de ce qui en sort. Chiens et chats se mèlent à la foule, le coq et l'ipod chantent, la vache hennit, c'est un miracle, et le canard.

C'est en vérité droit divin, reconnu par notre constitution séculaire, et devoir de chacun. Nous toucherons en effet à l'extase le jour où les politiciens, patrons, professions libérales, hospitalières, juges & autres, feront fi de leurs petits tracas et vaines obligations — le jour où TOUT LE MONDE se joindra à ce joyeux cortège corréligionnaire de paix et de justice sociale. Et universelle.

Je ne saurais exprimer l'intensité de mon sentiment à cette pensée, qu'en paraphrasant Judge Doom.

My God, it'll be beautiful.

*

Votre toujours-serviteur.
Car la viande noire fait la nique aux crocs, madame.